L’organisation internationale de défense, l’inculpation du chef rebelle est un avertissement à d’autres individus impliqués dans de graves crimes et dans des positions de pouvoir, que le régime d’impunité dans le pays est peut-être en train de vaciller.
Cette semaine, la Cour pénale spéciale (CPS) en République centrafricaine a annoncé avoir inculpé Abdoulaye Hissène pour des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en 2017 en tant que chef du groupe armé Front populaire pour la renaissance de la République centrafricaine (FPRC).
Dans un pays qui compte de nombreux individus impliqués dans des crimes de guerre, Abdoulaye Hissène se distingue particulièrement. Il a été commandant au sein de la Seleka à ses débuts et a occupé des fonctions de ministre quand les rebelles tenaient la capitale, Bangui, en 2013. Plus tard, il a été l’un des leaders d’un groupe dissident dirigé par Noureddine Adam, un fugitif soupçonné de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, y compris d’actes de torture, par la Cour pénale internationale.
Les combattants d’Abdoulaye Hissène ont été impliqués dans des violences commises à Bangui en 2015, en septembre et octobre, ainsi qu’en décembre, au moment où la population votait lors d’un référendum constitutionnel, dans le quartier PK 5 de la ville. Human Rights Watch a documenté le meurtre de centaines de personnes et la destruction de milliers de maisons par ces combattants au nord de la capitale de 2014 à 2017.
Abdoulaye Hissène serait détenu dans une base militaire qui sert aussi de centre de détention pour les prisonniers de haut rang. Le 7 septembre, il a comparu devant la CPS, un tribunal basé à Bangui créé pour juger les graves crimes commis dans le pays. Le personnel de ce tribunal, qui bénéficie d’une assistance internationale, est composé de juges et de procureurs internationaux et nationaux.
Abdoulaye Hissène avait été arrêté une première fois en 2016, mais ses hommes l’avaient fait évader de sa prison à Bangui après seulement quelques heures d’incarcération. Quelques mois plus tard, des hommes placés sous son autorité et celle de Haroun Gaye, un autre chef de la Seleka, ont enlevé cinq policiers. Les forces internationales de maintien de la paix ont lancé une opération pour tenter de les secourir mais celle-ci a échoué et plusieurs personnes ont été tuées. En août 2016, Abdoulaye Hissène était à la tête d’un convoi lourdement armé qui a quitté Bangui en engageant plusieurs échanges de tirs avec les casques bleus onusiens. En 2017, les États-Unis et les Nations Unies l’ont placé sur une liste de personnes visées par des sanctions. En 2018, un tribunal pénal à Bangui l’a jugé par contumace et l’a condamné pour plusieurs chefs d’accusation, y compris pour association de malfaiteurs, détention illégale d’armes, atteinte à la sûreté de l’État et rébellion.
En 2020, Abdoulaye Hissène a rompu avec les autres groupes de la Seleka et a refusé de soutenir une nouvelle coalition rebelle, ce qui lui a valu les bonnes grâces de l’actuel gouvernement. En 2022, il a fait les grands titres des médias pour avoir participé à un dialogue politique. Abdoulaye Hissène se sentait protégé et vivait à Bangui, sans crainte. Son arrestation est un avertissement à d’autres individus impliqués dans de graves crimes et dans des positions de pouvoir, que le régime d’impunité dans le pays est peut-être en train de vaciller.
Source : Human Rights Watch